La lecture de Nicole.S: "Double Nelson" de Philippe Djian: le muscle et la plume.....

 

Un " Double Nelson ", c'est une prise de soumission en catch qui consiste à faire abandonner l'adversaire.

Voici donc Luc, romancier pas trop raté – après tout, il semble vivre de sa plume, ce qui est un rare privilège – pourtant tourmenté par les affres de la page blanche. Il y a des drames plus bouleversants pour nous occuper l’esprit....

Bref, Luc n’a guère le temps de se lamenter sur une rupture qu’il a pourtant provoquée – un post-it collé sur l’armoire de la salle de bains, on a vu plus élégant. 

Car Édith, membre des Forces Spéciales, débarque de nouveau nuitamment chez lui, blessée et le suppliant de la cacher pour la mettre à l’abri de ceux qui en veulent à son matricule et ont manifestement recours à des méthodes fort expéditives. Sa dernière mission, qui a échoué, était justement centrée sur une mystérieuse propriété à quelques kilomètres de leur domicile. Ce qui entraîne dans la vie déjà hautement instable d’Edith et Luc l’irruption de dangereux mercenaires, mais conduit aussi au montage d’une opération très risquée de libération d’otages. Et pourquoi pas ?

 Autrement dit, on les voit bien tous les deux tels l’eau et le feu.

Si vous ajoutez à cela les assauts de la petite amie du voisin de Luc, érotomane à ses heures, qui se prend d’une passion dévorante pour notre écrivain qui n’en demande pas tant, vous avez les éléments d’un imbroglio qui, en fait, semble beaucoup amuser Djian et nous par la même  occase . 

Vers la fin, après bien des péripéties de toutes sortes, il n’y a plus d’électricité dans la maison de Luc. C’est normal, tout le monde a pété les plombs : lui, elle, le voisin Marc, sa compagne à demi-folle .

Il n’y a guère que le père de l’écrivain, médecin paisible et expérimenté, pour garder son sang-froid. Il est là comme le soigneur dans les combats. Il apparaît entre les rounds avec son éponge magique, ses pansements, ses conseils de bon sens que tout le monde écoute et que personne ne suit.

« Je ne te parle pas d’elle, répondit Luc. Je ne suis pas libre parce que j’ai un roman à écrire sur le dos. Ça c’est une vraie vacherie. C’est pire qu’une femme. Ça ne dort jamais, ça demande une attention permanente, ça bouffe toute l’énergie, ça siphonne les rêves et ça bousille les reins. Ce n’est pas ce que j’appelle être libre. Je ne connais aucune femme qui pourrait supporter une relation pareille et ça je peux le comprendre. Il n’y a pas plus casse-couilles qu’un écrivain au bout d’un moment. »

L'avis du Délirien: ⭐⭐⭐⭐

Entre violence et humour, ce combat de catch amoureux en plusieurs rounds est une belle réussite même si l'invraisemblance des situations pourrait choquer !

J'ai aimé l'écriture de Djian, avec son absence de ponctuation autre que points et virgules, ses dialogues mis au même niveau que le reste, etc. 

Et aussi sur les touches d’humour, léger mais toujours un peu doux-amer.

Son écriture est très visuelle, nul doute que ce nouveau roman pourrait être adapté par un Tarentino, ça dégage dans tous les coins !!

A propos de l'auteur:

Philippe Djian est un romancier, nouvelliste, parolier et scénariste.

Il est diplômé de l'École supérieure de journalisme de Paris. Il part ensuite pour l'Amérique du Sud réaliser un reportage qu'il réussira plus tard à vendre à l'hebdomadaire L'Humanité Dimanche. Il sera également docker au Havre, magasinier chez Gallimard, vendeur, interviewer de Lucette Destouches, la veuve de Céline, pour Le Magazine littéraire en 1969.

Son premier livre, "50 contre 1", paraît en 1981. Le succès n'est pas immédiat, mais l'adaptation au cinéma par Jean-Jacques Beineix de son roman, "37°2 le matin" (1985), en 1986, lui apportera la popularité.

Il a publié "Lent dehors" (1991), "Sotos" (1993), une trilogie composée de "Assassins", "Criminels" et "Sainte-Bob" parue en 1998, "Ça, c'est un baiser" (2002), "Frictions" (2003), "Impuretés" (2005), la trilogie Doggy bag (2005-2008).

"Bleu comme l'enfer" (1983) est adapté au cinéma en 1986 par Yves Boisset. En 2009 parait "Impardonnable", Prix Jean-Freustié, adapté au cinéma par Téchiné avec A. Dussolier et C. Bouquet, puis "Incidence" (2010), adapté au cinéma en 2013 par les frères Larrieu sous le titre "L'amour est un crime parfait". "Oh" qui obtient le prix Interallié 2012 est porté à l'écran en 2016 sous le titre "Elle" par Paul Verhoeven avec Isabelle Huppert.

Il est aussi parolier notamment pour son compère et ami Stefan Eicher. 

 Il est aujourd'hui installé à Biarritz.


Partager votre avis dans la section "Commentaires" juste en dessous.

Commentaires

  1. Beaucoup d'humour aussi dans ton billet. Ca fait longtemps que je n'ai pas lu de roman de Philippe Djan... Je prends...
    Isabelle

    RépondreSupprimer

Enregistrer un commentaire

merci d'avoir laissé ce commentaire très pertinent !