La lecture de Nicole.S: "Orgueils et préjugés" de Jane Austen: un très grand classique de la littérature anglaise.

Nous sommes au début du 19e siècle à Longbourn, village rural situé à 80 kilomètres de Londres. C’est là qu’habitent les Bennet.

Le père Bennet est un homme bon, rationnel, mais peu fortuné. Sa femme, Mrs Bennet, a une personnalité plus difficile. Elle est sujette à des crises de panique lorsque les choses ne se passent pas comme elle veut et n’a qu’une idée en tête : marier ses filles, ce qui assurera leur avenir financier.

Car ils ont ensemble cinq filles, aux caractères forts différents: 

Jane, l’aînée de la famille, Elizabeth, l’héroïne du roman, Lydia et Kitty, plutôt frivoles 
Mary, à l’attitude moralisatrice (elle s’exprime en paraboles, ce qui agace tout le monde)

Charles Bingley, un riche célibataire (j’insiste : riche et célibataire) s’est récemment installé dans une propriété voisine. La mère Bennet est sur le pont, il lui faut ce gendre..... 

Lors d’un bal, Bingley s’intéresse immédiatement à la fille aînée de Bennet, Jane, qui en est ravie.
La rencontre entre un ami de Bingley, Darcy, et notre Elizabeth, se passe moins bien. Darcy est rempli des préjugés contre l’infériorité sociale des Bennet, alors qu’Elisabeth est répugnée par le snobisme de Darcy.

Entre en scène un certain Collins, personnage assez fadasse , mais qui est l’unique héritier du père Bennet, qui a eu le malheur de n’avoir que des filles.

Le Collins en question se pointe donc avec la ferme intention de marier une des Bennet. Comme l’aînée est prise, il demande cavalièrement la main d’Elizabeth, qui le remet à sa place, au grand dam de toute la famille. 

Le pauvre Collins finira avec Charlotte, une amie d’Elizabeth.

Au fil du roman, on verra donc se développer les relations entre Bingley et Jane, Collins et Charlotte, mais surtout, entre Elizabeth et Darcy qui se recroisent ici et là.
Car si l’aversion d’Elizabeth pour Darcy ne semble qu’augmenter, Darcy, lui, s’attache de plus en plus à Elizabeth, impressionné par son intelligence et sa force de caractère. Il perd peu à peu ses moyens…

Comme dans toute bonne histoire d’amour, Darcy et Elizabeth devront surmonter plusieurs obstacles, à la fois personnels ou imposés par les règles de la société dans laquelle ils évoluent.

C’est l’aspect central du roman, qui questionne la nature de l’amour face aux distorsions causées par les constructions sociales.

Dans le Longbourn de Jane Austen, les familles sont grandes, presque tout le monde a un quelconque titre et les liens familiaux sont très importants. Austen a créé une espèce d’arbre généalogique, un organigramme de l’amour impressionnant.

On se souvient qu’à l’époque, les déplacements se font en calèche, right? Il n’y a pas trop d’intérêt à courtiser quelqu’un qui est éloigné géographiquement. 

« Trois jours de route pour une petite marche romantique en forêt??? » Non merci.
Les personnages sont toujours le voisin de l’un ou le cousin de l’autre. Lorsqu’on s’habitue à l’abondance de noms et prénoms dans le livre, cela devient plutôt amusant de voir défiler ces hommes et ces femmes de bonne famille. 

Et Jane Austen prend un malin plaisir à décrire tout ce beau monde sous leur moins bon jour.

Sur le pauvre cousin Collins : 

« [Un homme ] dépourvu d’intelligence, et ni l’éducation ni l’expérience ne l’avaient aidé à combler cette lacune de la nature. »

Le thème qui unifie tous les autres est la différence entre l’homme et la femme au début du 19e siècle.
Dans l’Angleterre des aristocrates, la femme n’a aucun droit légal, pas vraiment la possibilité de se choisir un métier, et dépend d’un futur époux pour assurer sa survivance. Son rôle est prédéfini, sa liberté de choix, inexistante.

Jane Austen nous raconte cette réalité à travers différents aspects de la vie d’une femme.
Pour Austen, l’environnement et l’éducation reçue ont un impact crucial sur le développement du caractère d’un individu. Le roman nous présente les attentes de la société face aux femmes.

Pour les jeunes femmes des classes moyennes, supérieures et aristocratiques, le mariage avec un homme disposant d’un bon revenu était presque la seule façon d’assurer leur sécurité financière.

On sait comment l’argent peut influencer certains choix de vie et bien eux, ça dirige carrément leurs amours.
Plus que ça, dans le cas de la famille Bennet, c’est un cousin (Collins) qui va hériter du patrimoine familial au décès de M. Bennet, car un héritage ne peut se transmettre à une femme. C’était dans la loi anglaise, jusqu’en 1925!
On comprend alors mieux l’impact des décisions maritales sur l’ensemble d’une famille.

Jane Austen nous présente, selon elle, les différents types de mariages possibles. Le coup de foudre, le mariage fonctionnel et le mariage heureux. Ce mariage est fondé sur l’estime, le respect mutuel et l’affection. La question de fortune ou de titre est présente, mais passe au second rang.  

À travers Elizabeth, Jane Austen livre un message lumineux. Elle suggère que le bonheur à deux passe par l’intelligence du cœur et par notre capacité à travailler sur les aspects difficiles de notre personnalité. 
L’histoire d’amour en est aussi une d’humilité.

Austen utilise abondamment la parodie et l’ironie, qui se retrouve dans sa façon de décrire les scènes ou les comportements.

Sa plume fait aussi un joli pied de nez aux conventions romanesques de l’époque, en ce qui a attrait aux romans d’amour. Elle se moque des clichés à l’eau de rose : la passion dévorante, les exploits du héros, la fragilité de l’héroïne… l’amour entre Darcy et Elizabeth est ancré dans la réalité. 
Extraits
Un bel exemple de l’ironie dont fait preuve Jane Austen :
❝Quand il n’y avait rien de mieux à faire, une promenade à Meryton occupait leur matinée et fournissait un sujet de conversation pour la soirée.❞

La satire, qui n’est jamais bien loin dans le roman. Ici avec notre palpitant M. Collins :

❝Après avoir tenu ses visiteurs assez longtemps pour leur faire admirer en détail le mobilier, depuis le bahut jusqu’au garde-feu, et entendre le récit de leur voyage, Mr. Collins les emmena faire le tour du jardin. Mr. Collins les conduisit dans toutes les allées et leur montra tous les points de vue avec une minutie qui en faisait oublier le pittoresque. Mais de toutes les vues que son jardin, la contrée et même le royaume pouvaient offrir, aucune n’était comparable à celle du manoir de Rosings qu’une rouée dans les arbres du parc permettait d’apercevoir presque en face du presbytère.❞

L'avis du délirien: ⭐⭐⭐⭐⭐

Un pur chef d'œuvre que je suis ravie d'avoir ENFIN lu !!!!

Jane Austen a dépeint son monde avec une précision et un œil satirique très agréable. Les traits d’esprit et les petites pointes sont faits avec classe et doigté, mais touchent dans le mille. 

Elle a placé au centre de l’œuvre un personnage si bien conçu que le lecteur ne peut qu’être happé par son histoire et souhaiter un dénouement heureux. 

Et c’est ce qui se produit. On tombe littéralement en amour avec Élizabeth.
Le roman se lit facilement. Les dialogues peuvent être assez 19e siècle, mais je n’ai jamais senti de lourdeur ou d’ennui.
Jane Austen semble avoir assez de distance, d’intelligence et d’humour pour nous raconter une réalité difficile avec une certaine légèreté, sans jamais tomber dans la plainte.

Si quelqu’un a la volonté de découvrir ses classiques, il ne peut pas passer à côté d’Orgueil et préjugés.

A propos de l'auteure:
Jane Austen (1775-1817)

Elle fait partie d'une fratrie de huit enfants. Son père, George Austen, est pasteur ; sa mère, Cassandra Austen , compte parmi ses ancêtres sir Thomas Leigh, qui fut lord-maire sous le règne de la reine Elisabeth.

Les revenus de la famille Austen sont modestes mais confortables. En 1782, Jane et Cassandra, sa sœur, sont envoyées à l'école à Oxford, puis à Southampton et à l'Abbey School de Reading.

Après une éducation brève, qu'elle complète grâce à la bibliothèque paternelle et aux conversations familiales, Jane commence à écrire. Elle va travailler avec acharnement (pratiquement jusqu'à sa fin prématurée), malgré une relation amoureuse douloureuse, la mort de son père et la maladie, dont elle va mourir à quarante-deux ans.

Parmi ses romans les plus célèbres, on cite : "Raison et Sentiments" (1811), "Orgueil et Préjugés" (1813), "Mansfield Park" (1814), "Emma" (1815), "Northanger Abbey" (1818) et "Persuasion" (1818).
Ses romans sont devenus de grands classiques de la littératures anglo-saxonne et romantique. Nous reste sa correspondance avec ses sœurs et nièces.

En Angleterre, le succès de Jane Austen est tel qu'en 2017 elle est la deuxième femme, après la reine d'Angleterre, à figurer sur les billets de banque.

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