La lecture de Nicole.S, Annie.C, Dany.C,Giséle.D,Marie Catherine.D: "Keila la rouge " de Isaac Bashevis Singer...Un Singer en hiver....

 
Cycle littérature des Pays de l'Est

La Pologne

Keila la Rouge, paru en feuilleton dans un quotidien yiddish de New York, entre 1976 et 1977. Quant à savoir pourquoi son auteur ne l’a jamais publié en volume de son vivant, cela reste une énigme. Hypothèse: ce roman donne une image peut-être trop sombre de la communauté juive de Pologne.

Nous sommes à Varsovie, en 1911, dans la légendaire rue Krochmalna, une ruche humaine. Tout au long de Keila la Rouge, il y plonge de nouveau son lecteur, qui redécouvre cette cour des miracles dans laquelle se bousculent rabbins, putains, pickpockets, mendigots, noceurs, souteneurs, gangsters, enfants perdus. Et tout un aréopage de petites gens «à l’existence banale, médiocre parfois, mais illuminée du dedans par la magie de l’esprit».

Le péché et le repentir
C’est là que vit Keila la Rouge, 29 ans, fille de bedeau, ex-prostituée à la chevelure flamboyante qui a officié dans trois lupanars en tutoyant le diable. 
Mais cette pécheresse en proie au repentir semble avoir fait la paix avec le ciel en épousant Yarmy la Teigne, un mauvais garçon lui aussi disposé à se ranger – et à ne plus convoiter les coffres-forts de la ville –, après quelques séjours derrière les barreaux. Il y a rencontré Max le Boiteux, un pervers qui viendra semer la zizanie dans ce couple improbable avant de violer la malheureuse Keila le jour de Yom Kippour. 
Désemparée, elle trouvera refuge à la synagogue, hantée par le désir de «redevenir une bonne fille juive».

Miracle, Bunem, le fils du rabbin, a des papillotes si blondes qu’il ressemble à un ange capable, de surcroît, de lire Spinoza tout en fréquentant les anarchistes de la capitale – la police secrète tsariste le surveille. De quoi attendrir le cœur de Keila. «De la folie pure», dira-t-elle, tout en ajoutant que ce genre de folie est peut-être «la substance même de l’existence».

L’aventure de l’exil
On retrouve toute la compassion singerienne dans ce roman à la Dickens où, sous des kippas déchirées par la misère, défilent Berthe la Bâtarde, Rivkele la Chope, Shmuel la Sauce, Leibush le Long, Noah le Battoir ou Haskele le Bigleux, qui n’a pas son pareil pour rouler dans la farine les Russes de Pologne. Leurs spectres vont peu à peu envahir la rue Krochmalna, bientôt grouillante d’indics et d’agents secrets, un climat de terreur qui poussera bien des habitants à tenter l’aventure de l’exil en Amérique, un voyage vers l’espérance que feront Keila et Bunem, à leurs risques et périls.

C’est un monde disparu qu’éclaire la lanterne magique de Singer, qui mêle le péché et la grâce, le merveilleux et le réalisme le plus cru dans cette fresque. Qui vaut quand même le détour parce qu’on y entend les truculentes confidences du petit peuple juif de Varsovie, avant que la guerre ne vienne déposer son linceul de cendres sur la rue Krochmalna.

L'avis du Délirien: ⭐⭐⭐⭐⭐

J'ai beaucoup aimé ce roman, foisonnant. L'écriture de Singer est fluide, legère. Il y a du Zola dans ce roman.

J'ai aimé la description de cette religion juive, la vie à Varsovie. Je suis allée en Pologne il y a quelques années et on y retrouve l'ambiance prégnante de cette religion.

La description du miroir aux alouettes des Etats Unis est si triste que nous compatissons tout au long du livre.

Il y a peu d'espoir dans ce roman.

A propos de l'auteur: 

Né à Leoncin, Pologne en1902 et mort à Miami, Floride , en 1991

Isaac Bashevis Singer (né Icek-Hersz Zynger) est un écrivain américain d'origine polonaise.

Il est né d'un père rabbin hassidique et d'une mère elle-même fille de rabbin. Il grandit à Varsovie où son père était leader spirituel mais également juge. Il poursuit ensuite des études dans une école rabbinique où lui est dispensée une éducation à la fois traditionnelle et religieuse. C'est là qu'il apprend l'hébreu moderne et s'intéresse entre autres à l'apprentissage des préceptes de la kabbale.

Il commence à écrire dès 1925 et publie quelques nouvelles dans des revues yiddish sous divers pseudonymes. Sa première œuvre "La Corne du bélier"est publiée en 1932. Ses ouvrages de jeunesse sont rédigés en hébreu mais il fait vite le choix d'écrire dans sa langue maternelle, essentiellement orale, que son travail d'écrivain va transformer en un témoignage précieux et en un document d'une richesse inouïe: le yiddish.

Afin de fuir l'antisémitisme grandissant à cette époque, il quitte la Pologne pour les États-Unis en 1935 avec son frère Israel Joshua Singer (écrivain lui aussi) et devient citoyen américain en 1943.

Durant sa carrière il a publié 18 romans, 14 livres pour enfants et des recueils de nouvelles. L'enthousiasme du public américain pour ses livres vient avec leur traduction anglaise dans les années 1950, entreprise par Saul Bellow.

Isaac Bashevis Singer prolonge la grande tradition des conteurs yiddishs traditionnels. Écrivain, auteur de romans en yiddish, il reçut le prix Nobel de littérature en 1978 «pour son art de conteur enthousiaste qui, prenant racine dans la culture et les traditions judéo-polonaises, ramène à la vie l'universalité des conditions humaines».

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